Les CeGIDD
Prévue par la loi de santé n° 2014-1154 du 22 décembre 2014, la réforme des CeGIDD – CEntres Gratuits d’Information, de Dépistage et de Diagnostic des infections sexuellement transmissibles (VIH, virus des hépatites, autres IST) – est entrée en application le 1er janvier 2016.
Avec les CeGIDD, un dispositif unique a remplacé les deux dispositifs de dépistage qui existaient depuis plus d’une vingtaine d’années, et qui n’avaient que très peu de liens entre eux, à savoir les CDAG (centres de dépistage anonyme et gratuit) et les CIDDIST (Centres de dépistage et de diagnostic des IST). Les CeGIDD voient leurs missions étendues et transformées, ils constituent bien plus qu’une fusion des deux dispositifs antérieurs.
Cette réforme était très attendue, réclamée depuis plusieurs années dans de nombreux rapports (Inspection générale des Affaires Sociales, Conseil National du Sida, Rapport d’Experts sur la prise en charge du VIH, Haute Autorité de Santé). Tous ces rapports formulaient la même critique, à savoir l’absence d’évolution du dispositif de dépistage notamment au cours de la dernière décennie. Ils faisaient le constat que le dispositif était au fil du temps devenu inadapté, en particulier pour les personnes les plus vulnérables aux risques de contamination par le VIH (avec comme conséquence un nombre de personnes dépistées séropositives de plus en plus faible au fil du temps). Dans le même temps, les études de modélisation de l’épidémie cachée du VIH en France (Dominique Costagliola et Virginie Supervie – UMR-S 1136 et Institut Pierre Louis d’Epidémiologie et de Santé Publique) ont montré qu’environ 30 000 personnes en France ignorent leur séropositivité VIH (dont environ 13 000 personnes vivant en Ile-de-France). L’ensemble de ces données ont en 2015 conduit à la constitution d’une offre globale de prévention et de dépistage, via des mesures d’accessibilité aux auto-tests et à la PrEP, suivies en janvier 2016 de la création des CeGIDD.
La réforme a prévu qu’un CeGIDD puisse intégrer l’un des dispositifs en tant qu’antenne d’un CeGIDD principal. C’est ainsi que le dispositif de dépistage associatif communautaire, le Checkpoint (4ème arrondissement), est devenu une antenne du CeGIDD Saint-Louis Fernand-Widal Lariboisière. [fiche le Checkpoint antenne CeGIDD Lariboisière St-Louis Fernand Widal]
Placé sous l’égide des ARS, le nouveau dispositif a pour objectif d’accroitre la visibilité et l’accessibilité à une offre de dépistage beaucoup plus ciblée (notion de publics prioritaires), mieux répartie sur le territoire, agissant comme une porte d’entrée dans un parcours de santé qui intègre la santé sexuelle. Avec la réforme, les consultations de dépistage pourront être nominatives ou anonymes, au choix des personnes. A tout moment, il y aura la possibilité de lever l’anonymat.
Dans le dossier de demande d’habilitation des futurs CeGIDD diffusé par les ARS, il était demandé de prévoir :
- la constitution d’une équipe pluridisciplinaire et élargie, regroupant les acteurs qui étaient précédemment chargés du dépistage du VIH et des autres infections sexuellement transmissibles (médecins, IDE, psychologue…), ainsi que les infectiologues amenés à prendre en charge les IST symptomatiques,
- le recours à d’autres spécialistes tels que dermatologue, urologue, proctologue, gynécologue, sexologue, conseillère conjugale et familiale (si nécessaire via une convention de partenariat),
- éventuellement l’implication d’associations agissant dans le champ de la prévention.
Ainsi les CeGIDD ont repris les missions qui étaient auparavant dévolues aux CDAG et aux CIDDIST (information, dépistage, orientation, diagnostic IST..). En réalité, leur champ d’action est beaucoup plus large, couvrant également les traitements ambulatoires des IST, ainsi que la prévention de l’ensemble des risques liés à la sexualité. A ce titre, les CeGIDD sont chargés de mettre en œuvre une approche globale de la santé sexuelle, à travers des consultations de sexologie, de contraception et orthogénie, de prévention et détection des violences sexuelles.
Au titre de leurs missions, les CeGIDD doivent également développer des actions de dépistage « hors les murs » (délocalisées), à partir de l’utilisation des TROD (tests rapides d’orientation diagnostique), afin de pouvoir mieux atteindre les populations les plus exposées au risque de transmission du VIH, et les plus isolées (les TROD pourront être utilisés à l’intérieur même des CeGIDD). Les CeGIDD sont aussi impliqués dans la prise en charge et le suivi des accidents d’exposition au sang (parmi lesquels les accidents d’exposition sexuelle).
La réforme des CeGIDD se caractérise par une simplification du régime juridique et financier du dépistage. Les dépenses propres aux activités de dépistage des CeGIDD sont prises en charge par l’Assurance Maladie à travers le Fonds d’Intervention Régional (FIR). Chaque CeGIDD a sa propre dotation forfaitaire annuelle dont le montant a été fixé par l’ARS (correspondant à un agrément basé sur un nombre précis de demi-journées d’activité). Les activités d’aval avec le recours aux prises en charge spécialisées (exemple le traitement d’une IST) sont financées selon le droit commun.
Tout au long de l’année 2016, une des tâches prioritaires des CeGIDD va être d’intégrer les nouvelles missions dans leur action au quotidien et d’organiser les liaisons entre les différents acteurs. Les défis ne manquent pas, notamment en ce qui concerne les financements, avec des budgets extrêmement contraints. Mais globalement tous les acteurs s’accordent pour dire que cette réforme était indispensable et la considèrent pertinente dans ses objectifs en termes de dépistage et d’accès aux soins.